Le pauvre diable

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Il avait été malmené ces derniers temps, des affaires sordides, une épreuve personnelle assez difficile. Le narrateur n’arrivait plus à écrire, ces derniers textes avaient été écrits difficilement. Pour cela, il était parti plusieurs jours se ressourcer à la campagne. Près des sapins, il avait besoin de se retrouver avec soi-même afin de mieux écrire. Il était parti ce jour-là faire une longue ballade en forêt, le grand air lui faisait du bien, de nouvelles histoires commençaient à germer dans son esprit si fertile. Le printemps commençait à revenir timidement, malgré l’humidité, il se décida d’aller faire une ballade en forêt. Ces bois sombres étaient des lieux propices à de nouvelles histoires fantastiques. Il marchait lentement, sereinement, il avait retrouvé le sourire depuis peu depuis ses derniers échanges épistolaires avec une femme. Elle était si mystérieuse,  une tendre complicité débutait. Depuis longtemps, il n’avait plus sourit, et si ces derniers écrits avaient évolués, c’était en partie grâce à elle. Il ne fit pas attention à lui, un homme mystérieux qui semblait l’attendre à la croisée des chemins. Un homme en costume, sa tenue vestimentaire n’était pas adaptée à ces lieux. Mais le narrateur surpris le salua poliment.

— Bonjour, monsieur! Dit le narrateur.

— Bonjour, mon ami! Belle journée n’est-ce pas ?

— Oui, le printemps semble pointer le bout de son nez! C’est signe que les beaux jours vont revenir!
Puis-je vous aider ?

Le narrateur regarda l’homme étrangement.

— Comment ça ? Demanda le narrateur.

— Je peux réaliser vos rêves ! Dit l’homme avec un grand sourire commercial.

— Je ne pense pas ! Merci quand même ! Bonne journée, monsieur !

Le narrateur reprit sa marche, l’homme était derrière lui. Mais quelques pas plus tard, l’homme était face à lui. Le narrateur examina l’homme attentivement. Homme en costume à la croisée des chemins, proposition commerciale, pouvoirs spéciaux…

Cela ne pouvait être que lui !

— Satan, je présume ?

— On ne peut rien vous cacher! Vous faites preuve d’un grand sens de la déduction!

— Que me voulez-vous ?

— Vous aider ! Dit-il dans un grand sourire.

— Si j’accepte que vous m’aidiez, je suppose que vous allez vouloir que je vous donne quelque chose. Vous ne semblez pas prendre les devises et espèce, ni les chèques et encore moins la carte bleue ! Que je vous rende un service ne servira à rien, vu que vous avez des serviteurs, donc c’est mon âme que vous voulez !

Le diable fut surpris.

— Vous faites preuve également d’une logique implacable! Je suis étonné! Oui, c’est bien votre âme que je voudrais en échange ! Habituellement, les gens acceptent de suite, ou partent en courant, mais vous, ce n’est pas le cas ! Je ne vous fais pas peur ?

Pourquoi ? Je devrais avoir peur ?

— Bien sûr que non ! Reprit-il rapidement.

— Bon, mais comme je vous ai dis, je ne suis pas intéressé !

— Ne dites pas non de suite !

— OK ! Alors premièrement à combien estimez-vous mon âme ? Demanda le narrateur.

— Pardon ? Demanda le diable étonné.

— À combien l’estimes-tu ! On se tutoie, ce sera plus rapide !

— Oui ! Oui ! On se tutoie ! Mais je n’ai pas l’habitude de cela !

— Tu veux acheter, tu me donnes un prix d’estimation, et ensuite on marchande ! C’est la base du commerce !

— Je… Je n’ai pas l’habitude des personnes aussi directe ! Tu es déjà franc, tu sembles ne pas avoir peur de moi ! En plus, tu as de la répartie et en plus tu entames les négociations avec moi ! Une très grande valeur ! Assurément !

— Alors que me proposes-tu ?

— La richesse ! C’est mon produit phare depuis des milliers d’années !

Le narrateur resta impassible, puis haussa les épaules.

— Qu’en ferais-je ?

— Ben, tu pourrais t’acheter tout ce que tu désires ! Tu seras heureux !

— Mouais ! Pas convaincu ! Le bonheur s’achète pas, il se mérite ! C’est un principe de droit et devoir ! Et puis, je ne pense pas que nous avons besoin de consommer pour être heureux !

— Tu pourrais avoir tout ce que tu désires !

— Oui, ton argument tient la route ! Mais le mériterai-je ? Non ! Je préfère encore travailler plutôt que de rester dans l’oisiveté ! Et puis cela m’occuperait. Je suis bien à la recherche d’un emploi en ce moment ! Mais vendre mon âme pour un travail, cela n’en vaut pas la peine ! Surtout vu les conditions de travail dans notre royaume actuellement.  En plus, je ne travaillerai pas pour moi, mais pour un autre ! Donc non ! Ce ne sera pas la richesse !

— Tu es sûr?

— Oui ! À l’heure d’aujourd’hui, j’ai meilleur compte à créer mon entreprise, j’ai un produit innovant en tête, je sais communiquer, j’ai des bases d’économies. Donc je peux aisément la créer. Donc en final, si je travaille dur, la richesse, je peux l’avoir !
Tu en es sûr ?

— Oui, certain ! Alors qu’as-tu d’autre en stock ?

Le diable était véritablement surpris, mais il fit une seconde proposition.
La gloire !

— Tu es sérieux ? T’as pas un truc plus con à dire ?

— Comment oses-tu me parler ainsi ! La gloire, ce n’est pas con ! Elle t’apporte la richesse plus facilement !

— Non, mais sérieux ! Reprit le narrateur. J’en fais quoi ? Déjà que là je m’isole pour retrouver l’inspiration, et toi tu me proposes la gloire ! Pour être dérangé sans arrêt ? Je n’en ai pas besoin ! Si je veux la gloire, je n’ai qu’a faire mon travail d’auteur du mieux possible ! Cela fait encore parti du principe du droit et devoir ! Autre chose ?
L’amour ? Demanda le diable.

— Je suis peut-être encore célibataire, mais non ! Tu es gentil ! Autre chose ?

— La plus belle des femmes ! Cela ne se refuse pas !

— Satan, mon petit ! L’amour ne se possède pas, il se donne ! Quand tu aimes, tu n’attends rien en retour. C’est cela l’amour absolu ! Quand tu n’attends rien d’une personne qui est dans ton cœur, c’est que c’est la bonne personne. J’ai rencontré quelqu’un, on se découvre, si ça marche, ce que j’espère tant mieux. Si ce n’est pas le cas, tant pis ! Quand on aime réellement, on laisse l’autre partir afin qu’elle soit plus heureuse ! Et puis confond pas sexe et amour, c’est complètement différent !

Satan était étonné, il restait sans voix. Le narrateur, toujours de marbre devant lui reprit.
Tu as mieux à proposer ?

— Heu ! Le pouvoir ?

― C’est anti-démocratique ce que tu me proposes ! Tu as jamais entendu parler des droits de l’homme et du citoyen ? Non, trouve-moi quelques choses de mieux ! Si je veux le pouvoir, je me présente à une élection, et c’est la démocratie qui fait le reste !

— Tu viens d’épuiser mes produits phares depuis des milliers d’années ! Ah si ! La vie éternelle ! C’est bien, ça ! L’immortalité !

— T’es un vrai génie, toi ! J’en fais quoi ? Pour ressembler trois cents ans plus tard à un vieux pruneau desséché ?

— Non ! Mais je peux te faire un contrat qui inclus la jeunesse éternelle !
Et je fais quoi durant tout ce temps ? Oui, j’accumule les richesses, la sagesse ! Mais j’en fais quoi ? Je serais seul, je verrais les personnes que j’aime mourir ! C’est bidon, ta proposition !
Tu n’as pas peur de mourir ?

― Franchement ! Non ! La mort n’est que l’instant où l’esprit s’affranchit de la matière! Et l’esprit, une fois libéré, recrée la matière ! C’est l’arnaque ton truc, tu vends l’immortalité à quelqu’un qui l’est déjà !

Le diable resta bouche bée. Il n’avait pas l’habitude de ce genre de situation.
Ben, oui ! Repris encore une fois le narrateur. Nous enchaînons les vies ! Bon, je te l’accorde, on est peu à en avoir conscience ! Tu as autre chose dans ta besace ?

Le diable soupira. Et dans un dernier espoir, fit une dernière proposition.
L’omniscience ou les pouvoirs divins ! Il ne me reste plus que cela, choisis entre les deux !
L’omniscience et les pouvoirs divins ça se ressemble un peu, car à priori, Dieu serait omniscient. Mais bon, cela ne m’intéresse pas non plus ! Tout savoir, ce serait terriblement ennuyeux ! Et le plaisir de la découverte ? T’en fais quoi ? Et ceci dit, devenir Dieu ne m’intéresse pas non plus ! Tu te rends comptes ? Il a plus de sang sur les mains que toi ! C’est horrible ! T’es pas jaloux, normalement, c’est toi le méchant ! Non ?
Heu !

— Et puis savoir que des gens vont mourir en mon nom ! Non merci !

— Je n’ai rien d’autre à te proposer ! Tu es difficile !

— Je suis pas difficile, je suis exigent envers moi-même ! Allez, Salut !

— Attends, j’ai un dernier truc ! La santé ! N’être jamais malade ! Cela ne t’intéresserai pas ?

— Heu ! Je fais attention à ce que je mange, je suis en train d’arrêter de fumer, je ne bois pas.

— Mais si je t’assure la santé ?

— Cela existe déjà ! On appelle cela une complémentaire santé !

— Tu m’énerves ! S’écria le diable ! Ma patience à des limites !

Le narrateur s’avança vers le diable, il le fixa droit dans les yeux.
Tu vas me faire quoi ? Tu crois me faire peur ? J’ai mon âme ! Donc tu ne peux rien contre moi, de plus, diable ou pas, tu ne me fais pas peur ! Et si tu n’arrives pas à m’acheter mon âme, t’as qu’à être un meilleur commercial !

Le diable baissa la tête, il s’assit au pied d’un arbre.

― T’es dur en affaire ! Très dur !

― D’ailleurs… Demanda le narrateur. Qu’est-ce que tu fous en forêt ? T’as pas mieux à faire ? Tu m’attendais ou t’avais rien d’autre à faire ? Va en ville, il y en a des âmes à prendre !

— Tu parles ! Elles sont corrompues !

— C’est pas ce qui te plaît ?

— Oui, j’ai emprise sur eux ! Mais leurs âmes n’ont aucune valeur marchande !

— Et ça te dérange ?

— Un peu, une âme corrompue, cela ne sert à rien ! Et puis même les enfants perdent leurs innocences de plus en plus tôt ! Les affaires vont mal ! Les âmes comme la tienne ont beaucoup de valeur, mais elles sont rares !

— Et ce qui est rare est cher ! C’est la base de l’économie ! Que veux-tu, c’est la crise !

— Que faire alors ?

— Changer de modèle économique et te faire un business-plan !

Le diable releva la tête subitement.

— Tu es sérieux ?

— Toujours quand on me parle business !

— Tu pourrais m’aider ?

— J’ai peut-être bon cœur, mais je ne travaille pas pour rien ! Si je te file mes idées, il faut payer les droits d’utilisation de brevet. Et pour que je bosse pour toi, il faut que tu me rémunères ! Je peux pas bosser pour toi, vu que j’ai encore mon âme !

— Tu vendrais donc ton âme pour rien au monde ?

— Si c’est pour rien au monde ! C’est que je te la donne, et pour que ton truc marche, il faut que tu me la vendes ! Donc le contrat serait caduque ! Si je te la donne, il faudrait que tu me donnes la tienne en échange ! Et là, c’est un troc ! Puisque tout ce que tu me proposes, ne m’intéresse pas ! Le contrat serait également nul !

— Que veux-tu en échange !

— On vient déjà de perdre une heure à négocier ! Tout ce que tu me proposes, ne m’intéresse pas ! Je suppose que tu n’as pas de moyens pour me rémunérer ! Je ne peux rien ! Désolé !

Le narrateur salua le diable d’un signe de la main, il commença à s’éloigner, quand le diable courut à sa poursuite.

— Mon âme ! Je te vends mon âme ! Tu m’aides, et les affaires reprennent ! OK ?

— T’es sérieux ?

— Oui, tiens, c’est même toi qui fais le contrat !

— OK ! Ça marche ! Répondit le narrateur en souriant.

— C’est vrai ? Tu acceptes de m’aider ?

— Oui, et je n’ai qu’une parole !

Satan lui tendit une feuille vierge, le narrateur rédigea le contrat, le lu attentivement puis le signa,. Ce que fit le diable à son tour… Le narrateur ne put s’empêcher de sourire.

— Tu es vraiment très dur en affaire ! En plus tu as de la chance, la mienne n’est pas corrompue !
Mais je le sais ! Répondis calmement le narrateur.

— Mais attends ! Tu…

— Oui ! Mon ami ! Tu m’as cédé ton âme ! Donc ta place ! C’est donc moi le diable, maintenant !
Tu es diabolique ! S’exclama Satan.

— C’est pour cela que je suis le diable ! Étonnant ! Non ?

Satan resta hébété devant le narrateur qui venait de prendre sa place.
Que vas-tu faire maintenant ?

— Je t’ai promis, un business-plan ! On fait un atelier de réparation d’âme. On ne les achète plus, on les vend ! Les gens rachètent leurs âmes !

— Contre quoi ?

— Des bonnes actions ! On fait fonctionner le business en sens inverse !

— Et quand on n’aura plus de stock ?

— Patience Satan ! Cela t’a pris près de 2000 ans pour tout acheter ! Cela prendra autant de temps pour tout revendre ! Et puis ! On est dans le siècle de la communication ! Si tu veux faire du business, il te faut une stratégie ! C’est ma spécialité !

Le narrateur fit un clin d’œil à Satan.

— Allez, viens mon ami ! Je t’offre un verre pour fêter cela !

Le narrateur et Satan s’éloignait de la forêt pour se rediriger vers le village. Le pauvre diable, venait pour une fois de faire une bonne affaire. Le narrateur le regarda, et lui tapa sur l’épaule ! Le narrateur, lui souriait. Il rassurait ce pauvre diable, les contes de fées ne sont pas réservés aux héros de littérature, mais à chacun d’entre nous. Suffit-il de vouloir le réellement !

©S.V– Copyright 00052749

 

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